Entrée en matière
Souvent dans ce cycle d'études nous avons parlé de la différence entre la religion et la foi. Je sais que la distinction entre les deux choses n'est pas toujours très claire dans l'esprit de tout le monde, parfois même pas dans mon propre esprit. Comment, dans la vie chrétienne de tous les jours, faire la différence entre la foi et la simple religiosité ? Il est facile de concevoir que quelqu'un peut aller à l'église, prier, chanter des cantiques, lire les Écritures, donner de son argent, faire des bonnes oeuvres, sans pour autant avoir la foi. Le problème, c'est que toutes ces choses sont des commandements de Dieu! Celles-là et un tas d'autres aussi : ne pas voler, ne pas mentir, ne pas démolir le portrait au prochain. Qu'est-ce qui fait qu'un acte d'obéissance relève, oui ou non, de la foi ?
Bonne question ! A mon avis, le facteur décisif est la source ou la motivation profonde de ce que nous faisons. Imaginez que vous vous trouvez dans une grande maison habitée de gens dont certains sont sourds. Vous pénétrez dans une des pièces et tombez sur un homme tout seul, assis sur une chaise. Vous remarquez que cet homme tape ses pieds et claque ses doigts en mesure. Vous devinez tout de suite ce qui se passe : il est en train d'écouter de la musique, et il est évident que ça lui plaît. Tout son corps veut suivre la musique, tout son corps veut répondre à ce que ses oreilles entendent. Il n'y a là rien de mystérieux ou d'étrange.
Ajoutons un troisième personnage à cette scène. Un des occupants malentendants entre dans la pièce et observe notre mélomane pendant quelques moments. Il se dit : « Tiens, il a vraiment l'air de s'amuser. Je vais essayer moi aussi. » Il s'assoit donc à côté de lui et commence à l'imiter. Avec maladresse et hésitation au départ, il s'efforce de claquer les doigts et de taper les pieds et de balancer son corps de la même manière que l'autre. Chaque être humain a un sens du rythme, cela ne dépend pas entièrement de l'ouïe. Après quelques minutes d'entraînement, l'homme sourd réussit à marquer la mesure au pied et aux doigts en synchronisation parfaite avec son ami.
Supposons qu'un quatrième personnage ouvre la porte et entre dans la pièce. Que voit-il ? Il voit deux hommes qui, apparemment, font la même chose. Y a-t-il au fond une vraie différence ? Absolument ! Toute la différence du monde. Les gestes du premier homme sont des réponses naturelles à la musique qu'il entend. Par contre, l'homme sourd ne fait qu'imiter des mouvements extérieurs alors qu'il n'entend pas la moindre note.
Quand nous vivons par la foi, nos attitudes et nos gestes sont une réponse à la « musique » que nous entendons. Cette musique c'est la bonne nouvelle de la grâce et de l'amour de Dieu, une bonne nouvelle que nous apprenons à mieux connaître, à mieux apprécier, à mieux aimer tous les jours. La religiosité s'en fiche complètement que vous soyez sourd comme un pot à l'amour et à la grâce de Dieu. Tout ce qui compte pour elle, c'est que les gens apprennent à battre le pied au bon rythme et à claquer les doigts au bon moment.
Quelle est donc la vraie source de notre vie religieuse ? Tite 2.11-13 (FC) : Car Dieu a révélé sa grâce, source de salut pour tous les hommes. 12 Elle nous enseigne à renoncer à une vie mauvaise et aux désirs terrestres, pour mener dans ce monde une vie raisonnable, juste et fidèle à Dieu. 13 C'est ainsi que nous devons attendre l'heureux jour que nous espérons, celui où apparaîtra la gloire de notre grand Dieu et Sauveur Jésus-Christ. La motivation profonde de la vie que les croyants doivent mener dans le monde c'est le dessein de grâce que Dieu nous a révélé.
Pourquoi trouve-t-on donc tant de religiosité dans l'Église ? La réponse est simple : c'est que tant de chrétiens n'ont jamais compris la grâce et l'amour de Dieu. Si tant de gens religieux deviennent mesquins et légalistes et formalistes et étroits d'esprit, c'est qu'ils s'imaginent servir un Dieu qui est mesquin et légaliste et formaliste et étroit d'esprit. Ephésiens 4.14-19 (TOB) : C'est pourquoi je fléchis les genoux devant le Père, 15 de qui toute famille tient son nom, au ciel et sur la terre ; 16 qu'il daigne, selon la richesse de sa gloire, vous armer de puissance, par son Esprit, pour que se fortifie en vous l'homme intérieur, 17 qu'il fasse habiter le Christ en vos coeurs par la foi ; enraciné et fondés dans l'amour, 18 vous aurez ainsi la force de comprendre, avec tous les saints, ce qu'est la largeur, la longueur, la hauteur, la profondeur… 19 et de connaître l'amour du Christ qui surpasse toute connaissance, afin que vous soyez comblés jusqu'à recevoir toute la plénitude de Dieu. Notez bien que l'apôtre Paul ne demande pas la force de faire des choses, d'accomplir des exploits spirituels. Il demande à Dieu la force de comprendre quelque chose : l'amour du Christ. C'est ainsi qu'on sera rempli de toute la plénitude de Dieu.
La connaissance de l'amour de Dieu provoque dans notre coeur une réponse aussi irrésistible que celle que la musique provoque dans notre corps. Présenter notre coeur et notre corps à un Dieu qui nous aime à la perfection devient alors une joie. La vie de foi ne nous semble pas pénible quand notre esprit est rempli de la parole de la grâce de Dieu. Or notre esprit ne sera jamais rempli de cette parole si nous nous bouchons les oreilles, si nous ne savons pas l'écouter.